En 1483, l'imprimeur lyonnais Guillaume Le Roy publie un Livre des Eneydes qu’il présente comme "translaté du latin en commun langaige". Conformément à cette indication, l'œuvre est fréquemment enregistrée dans les répertoires comme traduction de l’Énéide, et parfois même comme traduction d'une paraphrase italienne du poème de Virgile. Cependant, la source italienne, si elle existe, n’a pas encore été identifiée, tandis qu'il apparaît évident que le Livre est un texte composite, fruit d'un travail éditorial raffiné et d'une pluralité de sources : l'Énéide, traduite à la lettre dans certains passages ; les versions de l'histoire de Didon proposées par Boccace, notamment dans le De casibus ; un Livre de la Reyne Didon, dont seuls quelques fragments sont conservés dans un manuscrit de la BnF ; des pans entiers de l'Histoire ancienne jusqu'à César. A cette pluralité de sources correspond une pluralité de traductions. À peine sept ans plus tard, le Livre des Eneydes est à son tour traduit en anglais par William Caxton qui, en 1490, en donne une version fidèle à l'original dans laquelle il tente parfois de corriger défauts, erreurs et incohérences du texte français, qu'il suit par ailleurs jusqu'au calque lexical et syntaxique. Une chaîne de traductions se dessine ainsi : une sorte de stratification trilingue entre le latin, le français et l'anglais qui laisse des traces dans certaines créations lexicales particulières, mais qui, surtout, marque significativement la réception et la circulation du matériau virgilien des deux côtés de la Manche, avant que les premières traductions "modernes" du poème ne voient le jour, dans l'une et l'autre langue, au-delà du seuil symbolique du XVIe siècle.
Virgile au croisement des langues et des textes : latin, français et anglais dans un Livres des Eneydes "translaté en commun langaige" / G. Rossi. ((Intervento presentato al convegno Crossing borders via translation(s) tenutosi a Roma nel 2022.
Virgile au croisement des langues et des textes : latin, français et anglais dans un Livres des Eneydes "translaté en commun langaige"
G. Rossi
2022
Abstract
En 1483, l'imprimeur lyonnais Guillaume Le Roy publie un Livre des Eneydes qu’il présente comme "translaté du latin en commun langaige". Conformément à cette indication, l'œuvre est fréquemment enregistrée dans les répertoires comme traduction de l’Énéide, et parfois même comme traduction d'une paraphrase italienne du poème de Virgile. Cependant, la source italienne, si elle existe, n’a pas encore été identifiée, tandis qu'il apparaît évident que le Livre est un texte composite, fruit d'un travail éditorial raffiné et d'une pluralité de sources : l'Énéide, traduite à la lettre dans certains passages ; les versions de l'histoire de Didon proposées par Boccace, notamment dans le De casibus ; un Livre de la Reyne Didon, dont seuls quelques fragments sont conservés dans un manuscrit de la BnF ; des pans entiers de l'Histoire ancienne jusqu'à César. A cette pluralité de sources correspond une pluralité de traductions. À peine sept ans plus tard, le Livre des Eneydes est à son tour traduit en anglais par William Caxton qui, en 1490, en donne une version fidèle à l'original dans laquelle il tente parfois de corriger défauts, erreurs et incohérences du texte français, qu'il suit par ailleurs jusqu'au calque lexical et syntaxique. Une chaîne de traductions se dessine ainsi : une sorte de stratification trilingue entre le latin, le français et l'anglais qui laisse des traces dans certaines créations lexicales particulières, mais qui, surtout, marque significativement la réception et la circulation du matériau virgilien des deux côtés de la Manche, avant que les premières traductions "modernes" du poème ne voient le jour, dans l'une et l'autre langue, au-delà du seuil symbolique du XVIe siècle.Pubblicazioni consigliate
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